Suite aux nouvelles mesures sanitaires prévues par le gouvernement et la mise en place du pass sanitaire pour certains lieux de la vie sociale en France, mais aussi pour certaines professions recevant du public, de nombreuses questions se posent quant aux pouvoirs des employeurs concernant d’éventuelles impositions de vaccin ou de pass sanitaire à leurs salariés.

Cependant, la crise sanitaire et les mesures exceptionnellement coercitives prises par le gouvernement n’autorisent pas n’importe qui à prendre toute mesure sanitaire qui lui semblerait appropriée pour sa structure, de façon arbitraire, sans considération des droits individuels et parfois de manière disproportionnée.

Ainsi, il nous parait important de répondre à certaines interrogations qui peuvent se poser face aux comportements de plusieurs employeurs dans le cadre de cette crise.

 

  • L’employeur peut-il demander à ses salariés la preuve de leur vaccination anti-covid ?

La loi du 5 août 2021 autorise l’employeur à demander la preuve de leur vaccination aux salariés concernés par l’obligation vaccinale. Les professions qui sont concernées par cette obligation sont listées dans cette loi.

Il s’agit ici d’une exception à la règle.

En effet, si votre entreprise ne rentre pas dans la liste des professions mentionnée ci-dessus, votre employeur ne peut pas demander une quelconque preuve de votre vaccin, même si la réponse est sur la base du volontariat. On revient à la règle de base qui prévoit que cette information est une donnée médicale individuelle relevant du secret médical à laquelle l’employeur ne peut pas avoir accès et sur laquelle il ne peut pas poser de questions aux salariés (droit au secret médical : article L1110-4 du code de la santé publique).

Il en va de même pour un éventuel pass sanitaire dont l’exigence ne serait pas imposée pour une profession.

Cela règle également la question d’un éventuel licenciement pour non-vaccination. L’article 1 de la loi punit d’ailleurs d’un an d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende le fait d’exiger la présentation d’un pass sanitaire en dehors des cas listés par la loi.

 

  • L’employeur peut-il contraindre les salariés non-vaccinés à demeurer en télétravail à 100% et permettre aux vaccinés de venir travailler sur site ?

En plus de l’impossibilité juridique, exposée au paragraphe précédent, d’obtenir la preuve de leur vaccination par les salariés, on distingue deux problématiques dans ce système que souhaiteraient mettre en place certains employeurs.

  • Premier problème : Si l’employeur décide de n’autoriser que les salariés vaccinés à travailler sur site et qu’il supprime donc les gestes barrières pour ces derniers, il ne respecte pas son obligation de sécurité générale (L4121-1) qui doit porter sur tous les salariés. En effet, il se décharge de la responsabilité de la prévention primaire du risque de contamination pour la faire peser sur les salariés directement. Ce serait à eux de choisir de s’appliquer ou non la mesure de prévention que constitue le vaccin et/ou de respecter les gestes barrières.
  • Deuxième problème : Interdire aux salariés non-vaccinés de se rendre sur site alors que les salariés vaccinés en ont la possibilité constitue tout simplement une discrimination sur la base de l’état de santé, allant à l’encontre de l’article L1132-1 du code du travail (principe de non-discrimination).

De toute évidence, ce système n’est pas possible et le Comité Social et Economique doit être vigilent aux « plans de transition » proposés par certains employeurs.

 

  • Comment le CSE peut-il agir face à un projet comme celui-là ?

Tout d’abord, le CSE doit s’assurer que l’employeur le consulte sur son projet car il s’agit objectivement d’un aménagement important qui modifie les conditions de travail des salariés (article L2312-8 du code du travail : thématique de consultation obligatoire).

Si l’employeur consulte le CSE sur un tel projet, mais qu’il apparait clairement qu’il a dans tous les cas l’intention de le mettre en œuvre, les élus pourront alors décider en séance de voter le déclenchement d’une expertise pour projet important modifiant les conditions de travail, et de désigner un cabinet d’expert habilité.

Si l’employeur consulte le CSE et n’a pas encore pris sa décision, l’avis des élus pourra reprendre les arguments juridiques exposés plus haut. Si la direction décide de passer outre ces arguments, le CSE aura toujours la possibilité de saisir l’inspection du travail pour non-respect des droits des salariés en matière de secret médical et discrimination sur la base de l’état de santé.